LIVRE VI - Le dernier soupir

Une ombre gisait là, au sol, recroquevillée sur elle-même, au pied d’un petit talus, quand soudain deux éclats apparurent, à peine scintillant, au milieu de cette masse informe. Puis un léger grognement se fit entendre, faiblement, couvert par le bruit sourd de la pluie. La pluie qui venait éclabousser furieusement cette vallée, cette parcelle de forêt. Et malgré la violente pluie, une chaleur outrageuse pesait, peut-être plus violemment encore, sur les environs sauvages. Les plantes et arbustes se pliaient, fouettés par la pluie. Le grognement retentit derechef. La bonne odeur de la terre détrempée couvrait à peine l’horrible odeur du sang. L’odeur d’un sang pourpre qui colorait la terre et lui donnait un léger aspect argileux. L’ombre se mouvait sur elle-même, péniblement ; cherchant, semblait-il, à se hisser sur le sommet du talus. Quand soudain elle se figea. Les petits éclats sombres s’étirèrent un instant.

Un bruissement. Un souffle rauque. Une respiration pénible. Non loin du talus, quelques plantes s’écartèrent pour laisser place à un elfe. Celui-ci, dans un piètre état, rampait difficilement au travers de la végétation. Très certainement blond à l’origine, ses cheveux étaient châtains roux, la terre et le sang ayant donné une curieuse teinte. Sa peau blanche était recouverte d’hématomes divers et de blessures allant des plus bénignes aux plus meurtrières. L’elfe s’arrêta enfin lorsque son corps fut entièrement dégagé des plantes environnantes. Il s’assit tant bien que mal, le dos contre un vieil arbre tropical et tourna la tête, lentement, de tous côtés, scrutant les lieux alentours. Soudain, sa tête se figea et tout son corps se relâcha. Sa respiration, quoique toujours affreusement difficile, devenait plus calme et moins bruyante.

- Alors, tu as survécu, dit-il tout à coup. Ca n’aura pas été sans peine : vois dans quel état je suis. L’elfe toussota, crachant quelques gouttelettes de sang, avant de reprendre : Pourquoi cet air étonné ? Croyais-tu sérieusement pouvoir entreprendre un tel voyage seul et, qui plus est, sans équipement ? Certes, tu as connu bien des malheurs desquels je n’ai pas pu te préserver. Certes, tu as connu bien des malheurs mais tu es aujourd’hui, ici, un peu grâce à moi.

L’elfe s’arrêta un instant, observant la masse sombre immobile.

- Quoi ? Quel est ce regard ? M’en voudrais-tu de t’avoir ainsi déshonoré ? Cherchais-tu simplement la mort ? Alors pourquoi ce désir sauvage de vivre guidait ta main vers les gorges et les tripes de tes ennemis lors de leurs maintes embuscades meurtrières ? Mais qu’importe tes raisons, ou peut-être bien ta folie, apprends que je ne faisais là qu’obéir aux ordres que l’on m’avait donnés. Je n’en sais certes guère sur l’affaire, comme à l’accoutumée – c’est qu’il est très souvent mauvais pour un voleur d’en savoir trop sur sa mission ou sa cible ; mais je puis être sûr que des amis tiennent chèrement à toi. C’est ceux-là à qui tu dois demander des explications, si ce n’est pas à toi d’en donner.

L’elfe fit une pause. Il fixa la masse sombre. Il s’éclaircit la gorge, déglutinant douloureusement.

- Pourquoi ne dis-tu rien ? Tu sais, j’ai beaucoup vagabondé, et j’ai vu beaucoup de gens – j’ai aussi fait beaucoup de choses, plus ou moins douteuses ou reprochables ; mais toi… toi tu es d’une drôle d’espèce, parole ! Je ne te connais point, je ne connais pas tes origines ni même ton rang. Peut-être as-tu du sang noble, qui sait ? Il est vrai que les nobles ont parfois des jeux très étranges, tu dois sans doute en être un, oui ! L’elfe étouffa un rire clair qui, visiblement, lui fit souffrir le martyr. Mais si je ne te connaissais pas, je t’ai vu te transformer, changer au fil de ton périple. Et je sais ce que tu es devenu. Tu es un meurtrier. Un assassin. Tu es dominé par tes instincts de meurtre et ta soif de sang. Pour un elfe, vous dire comme c’est navrant ! Une telle beauté, un tel prestige acquis dès la naissance par la noblesse de notre sang, voir tout ça gâché par des instincts primaires dignes de vulgaires bêtes… Je sais qui on m’a envoyé protéger. Un Elfe, digne de ce nom, un Seigneur très certainement, entouré si ce n’est aimé. Peut-être apprécié, peut-être demandé même. On ne m’a pas demandé de protéger une ombre, un fantôme assoiffé de vengeance. Aussi, ma mission s’achève ici. Désormais, il te faudra compter sur tes propres forces pour survivre. Mais dis-toi bien une chose…

L’elfe toussota et cracha une grosse quantité de sang.

- Mais dis-toi bien, continua-t-il, que seul, à errer ainsi sans but, tu ne seras rien d’autre qu’un mort en sursis. Et, qui plus est, si tu continues à tuer ainsi, d’une manière égale, ennemis et amis, tu seras perdu à jamais. Ton esprit s’effilochera, tu perdras totalement ton identité. Tu ne connaîtras plus aucun repos jusqu’à ce que, enfin, la première personne qui te croisera, prise de pitié pour toi, mettra fin à tes jours lamentables.

La pluie tombait toujours, mais plus fine et moins violente à présent. De légères nappes de brouillards apparaissaient de ci de là. Les bruits de la jungle reprenaient doucement, comme si la vie mise en suspend au début de l’orage reprenait son cours petit à petit. Bientôt, les animaux sauvages parcourraient les alentours, sous les cris d’innombrables singes et oiseaux tropicaux.

- Je meurs, dit tristement l’elfe. Je meurs, enfin. Mon maître serait certainement furieux d’apprendre la manière dont je suis mort. Il serait d’ailleurs furieux pour bien des choses… Finalement, mon destin était bien différent de celui dont il me parlait… Je meurs et je perds là mes plus beaux instants. Je meurs et c’est de ta faute.

L’elfe leva légèrement son bras, d’une impulsion brusque, en direction de la masse informe, toujours inerte sur le talus. Le bras retomba aussitôt, en un mouvement incontrôlé.

- Autrefois, oui il y a bien longtemps, j’étais comme toi, reprit-il. J’étais empli de haine et je ne savais rien faire d’autre que tuer. Bien souvent, j’escroquais les gens qui déambulaient dans les rues de la ville… Je braconnais. J’étais de toutes les rixes. Et je prenais beaucoup de vies. Trop de vies. J’étais un véritable paria, détesté par mon propre peuple. Et un jour, je m’en suis pris à la mauvaise personne. Une personne bien trop forte pour moi. Je crus alors ma dernière heure arrivée, et certainement que ç’aurait été le cas si la personne avait été tout autre. Mais ce fut là celui qui devint par la suite mon maître.

L’elfe s’interrompit et secoua vivement la tête. Il se perdait dans des souvenirs qu’il croyait enfouis au plus profond de lui. Il n’aurait jamais cru se livrer ainsi à un inconnu. Sans doute était-ce là un effet lié à sa fin proche ? L’elfe grommelait maintenant des paroles inaudibles, se parlant très certainement à lui-même. Il ne vit pas l’ombre se lever alors péniblement et se diriger lentement, dans un silence absolu, vers lui. La forme sombre s’arrêtât à quelques centimètres à peine de l’elfe moribond. C’est seulement à cet instant que ce dernier remarqua la présence malsaine à ses côtés.

- Tu meurs…, prononça l’ombre. Tu meurs et c’est ma faute. Il y a bien des choses à te répondre, ami, mais si peu de temps à présent. Et cela fait si longtemps que je n’ai point prononcé de mots que ceux-ci peinent pour venir à ma bouche.

Les éclats sombres scintillèrent davantage et des perles vinrent rouler sur ce qui apparaissait être un visage. Les perles bleutées prirent alors une couleur rougeâtre, tout en courrant le long des joues elles-mêmes recouvertes de sang séché. Et ce fut des larmes de sang qui tombèrent sur le visage pâle de l’elfe.

- Puisque tu meurs par ma faute, permets-moi de prendre ton fardeau sur mes épaules. Ami, avec tes dernières forces, chuchote-moi à l’oreille ton rêve et tes espoirs et permets-moi de les réaliser pour toi.

Alors l’ombre se pencha derechef sur l’elfe, lui soutenant délicatement la tête. L’elfe murmura quelque chose d’inaudible puis un long soupir s’échappa du corps maintenant et à jamais inerte.




Edit :
- modification du titre
- modification du paragraphe "- Pourquoi ne dis-tu rien ?", "digne de vulgaires animaux" devient "digne de vulgaires bêtes"
- modification du dernier paragraphe (rajout : [du corps maintenant] "et à jamais" [inerte.])
- correction de fautes

ma fille, ça ne représente que deux petites pages de Word, avec beaucoup de paragraphes donc de saut de ligne.

certes ça te fait peut-être beaucoup à lire par rapport à ta flemme, mais vois-tu je fais déjà des petits bouts d'histoire... je ne sais pas si tu as vu mais tu as déjà le livre 4 et 5...

il faut 20 minutes à tout péter pour lire ces petits bouts d'histoire...

enfin, après, tu fais ce que tu veux moi je m'en fous à la limite : je me fais plaisir à l'écrire et je le poste pour ceux qui prennent plaisir à le lire.

si je réponds ici c'est juste pour dire, en fait, que j'aime pas ce genre de réponse qui servent à rien (m'est avis et sans vouloir t'offenser)

autre chose : à la relecture du livre 5 je me suis aperçu de terribles fautes d'orthographe voire carrément d'inversion de mot à la même sonnorité ! honte à moi ! et là, on peut parler de réelle flemme : je ne compte pas les corriger. mais ceci est hors de propos, ce que je voulais dire c'est : je vous prie de ne pas m'en tenir rigueur.

j'aime écrire mais pas me lire, aussi je ne me relis pas et ça... c'est vraiment dramatique.

toujours aussi passionnant momo ;p

j'ai hate de lire la suite, t'as du talent mec

mais bon il s'est pas passé grand chose la , ya encore trop de suspens ^^

ouaip, mais c'était une rencontre importante et c'est pour cela que je l'ai détaillée.

bon, évidemment, je m'entraine aussi, hein, c'est des essais tout ça... normalement, j'espère que tu te rends bien compte, mais les livres précédents auraient dû être bien plus détaillés. j'avoue, j'avoue... je fais ça un peu à la hâte et surtout en fonction des humeurs du moment. bien que je sache tout de même où je vais, enfin pour l'instant en tout cas.

tu dis que ça t'apprend pas grand chose ? hum il est vrai qu'il ne s'y passe pas grand chose là... disons que c'est plus un détail sur la disparition des deux personnages... mais on comprend bien que Erindil est mort et que Moritandil est vivant. certes, on pouvait largement s'en douter ^^ m'enfin voilà, là, c'est clair =) ceci dit, veuillez noter que, dans ce livre, je n'ai nullement évoqué le nom du personnage, ce n'est pas tout à fait anodin.

je pense que dans deux ou trois livres, il y aura vraiment du neuf... m'enfin bon, je peux pas trop en dire encore =)

le livre un on la pas eu?

Sinon j'aime pas mal le style quoi que dans le precedent sa parlait un peu trop (en terme de repetition des mots "Etincelle Noire" qui reviennent souvent a mon gout).Mais c'est fort sympatique a lire Mes felicitations pour ce travail donc.

Enfin la je suis un peu perdue sur l'ombre ...qui est-ce? le rogue qui le piste ou lui il est mourru deja? xD

erf j'ai voulu pas mettre de nom pour vous laissez un peu réfléchir, peut-être était-ce un peu trop exagéré ? pourtant je ne sais plus quel grand écrivain a dit quelque chose du style qu'un bon bouquin, fallait que le lecteur fasse une bonne partie du travail ^^

bon, je te laisse un peu réfléchir ; je suppose que tu auras la réponse dans le prochain livre.

le livre 1, c'était tout simplement le RP dans ma présentation de Moritandil, il y a déjà bien longtemps =)

c'est le livre 2 et le livre 3 qui n'existent pas réellement. je trouve ça sympa de se dire que des livres ont été perdus ^^ mais, en réalité, je prévois de la marge pour éventuellement raconter les péripéties entre le moment de mon entrée dans la guilde et le moment du livre 4.

à vrai dire, on pourrait imaginer le livre 2 comme relatant les hauts faits de Moritandil, notamment comment il a abattu le terrible Creusechair à lui seul.
quant au livre trois, j'ai toujours espéré pouvoir raconter un terrible combat contre... hélas je ne connais pas le nom de l'ennemi ! (pour ça que j'ai jamais pu écrire le RP XD) : c'était un boss de quête, Gorgor et moi avions la quête, nous étions accompagnés d'Adria. nous avons, Gorgor et moi, provoqué l'apparition du boss simultanément ! On a dû faire deux fois le boss en même temps ! Un gros boss quand même ^^ et on a réussi =) c'était très serré, mais on l'a fait =) je crois que c'était une quête de groupe 5 et on se l'ai faite à 3 avec le boss doublé, magnifique ^^

sinon, pour ce qui est des mots "Etincelle Noire", il s'agit tout simplement du nom, dans le language commun, de mon personnage, Moritandil. alors, tout simplement, j'essayais d'alterner l'un et l'autre pour varier. c'est chiant de toujours dire "Moritandil fait ça, Moritandil fait ci, Moritandil a dit ça, et Moritandil est parti et Moritandil..."
dans le livre 5, je l'appelle davantage "l'elfe noir". en prenant les livres à la suite, la diversité est peut-être plus prononcée. ici, c'est "l'ombre".

bon, après, comme je l'ai dit, je ne me relis pas, alors ça peut arriver qu'il manque un mot, ou qu'il y ait des doublons ou, ça arrive parfois ^^, que j'écrive un début de phrase et que la fin coïncide pas mais pourtant on comprend le sens (ça c'est quand j'hésite entre deux tournures et que je fais pas gaffe XD). enfin voilà, j'essaye d'éviter au mieux les répitions, ... lors de l'écriture mais c'est un travail qui se fait, bien souvent, à postériori, lors de la relecture.

si tu veux quelques indices sur les personnages, dans ce livre, c'est facile : y a combien de personnages dans ce livre ? les protagonistes du livre précédent, qui était-ce ? le personnage central de l'aventure, celui qui ne peut forcément pas mourir ^^, qui est-il ?
normalement, si tu as relativement bien lu les livres précédents, lors du monologue de l'elfe mourrant, il y a largement de quoi comprendre de qui il s'agit ^^

est-ce justement l'etincelle noir au coeur de moritandil qui meur? ^^" un peu style naruto ou quand il parle au renard sa se deroule au sein de naruto mais on assiste a la scene quand meme?

rooooooooh t'es allé super loin là, l'ami Px ! ^^ ç'aurait pu être super stylé ceci dit, c'est con que je n'y ai pas pensé moi-même... ^^ m'enfin je prends note et me dis que, pourquoi pas, dans un avenir pas si lointain que ça, je m'essaye à ce style =) ceci dit... non Px, c'était pas aussi farfelu ^^

allez, c'est bon, je commence à avoir méchament l'idée du style du prochain livre =) ça va être sympa ^^ et j'essayerai de faire plus clair parce que sinon oui on va rien piger ! XD